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PRÉFACE.

rique, le fantastique, l’ironiste, le réaliste, le lyrique, l’analytique et tout le reste de cette longue bande aux titres sauvages, sans oublier le roman-feuilleton, pègre du genre.

C’était à se croire dans la boutique d’un pharmacien en face des bocaux étiquetés.

Or, si l’on s’était donné la peine de réfléchir, n’aurait-on pas promptement trouvé que, dans le roman qui nous a donné la sensation de la vie, toutes les classes sont représentées ? Les unes avec un fort coefficient, les autres avec un faible ; mais toutes sont là, comme toutes les notes de la musique se trouvent dans un violon accordé, prêtes pour l’exécution de tous les airs du monde ; des plus simples aux plus compliqués.

Flaubert, par exemple, n’est-il donc qu’un romancier réaliste parce qu’il a écrit Madame Bovary ? Ne peut-on le faire entrer, paré d’aussi justes titres, dans la classe des ironistes, à cause de Monsieur Homais ? Dans la classe des pamphlétaires à cause de brefs passages où il fouaille si durement la société ? Dans la classe des sentimentaux, à cause des aspirations d’Emma ? Dans la classe des rustiques, à cause du père Rouault ? Dans la classe des analytiques, à cause du caractère si décanté de Charles Bovary ? La classe des lyriques lui est ouverte, parce qu’il a le bel amour si fou d’Emma pour Rodolphe ; et la classe des traditionalistes aussi, pour tout ce qu’il exprime de tendresse discrète à l’égard de la demeure solidement organisée, base première de la bourgeoisie, dont rêve Emma — et beaucoup d’autres classes,