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NÊNE.


Violette cousait dans la maison de sa mère. Elle se préparait un corsage pour l’assemblée et le modèle était devant elle, sur un catalogue venu de Paris.

La mode des villes, cette année, était de montrer ses épaules et surtout sa gorge ; et Violette essayait de la faire suivre au bourg de Chantepie où il y avait des filles très coquettes.

Elle avait choisi pour elle-même un modèle audacieux, échancré en pointe jusqu’aux seins.

Elle hésitait cependant à tailler aussi hardiment dans l’étoffe.

Le facteur ouvrit la porte :

— Mademoiselle Violette !… « personnelle »… c’est une lettre de galant, ma jolie fille.

Elle ne répondit rien, se contenta de regarder cette adresse bizarre, écrite au crayon, d’une main inconnue.

Le facteur parti, elle déchira l’enveloppe. Aux premières lignes, dans ses yeux jeunes, une pitié passa pour ce garçon si beau dont l’amour l’avait flattée et qui, maintenant, était abîmé pour toujours.

Mais ce fut très bref : sous la lèvre rouge, une dent brilla, aiguë. Si elle sortirait ! Si elle irait à l’assemblée avec les autres ! Non, vraiment, il était trop bête… cela devenait risible.