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NÊNE.

cette chose à laquelle il ne fallait pas penser pour le moment, viendrait peut-être petit à petit.

Elle se disait :

— J’ai failli m’en aller cependant ; j’ai failli faire la mauvaise tête… Si j’étais partie de la sorte, tout de suite, sans réflexion, qu’est-ce que je serais devenue ? Qu’est-ce que je ferais sans Lalie et sans Jo ? Bien sûr, je ne m’accoutumerais pas loin d’eux !

Pour ceux-ci en effet sa tendresse devenait d’une vigilance merveilleuse.

Elle aimait sa mère, ses sœurs, Michel… elle était toute bouleversée par le malheur de son frère… et d’autre part il y avait des gens qu’elle détestait ou qu’elle tenait en défiance ; bien des images douces ou tristes lui venaient dans l’idée, mais elles passaient toutes, se suivant l’une l’autre comme des voyageurs dans une auberge. Pour Lalie et pour Jo la table était toujours servie ! Ils avaient la place capitonnée et douillette, la place de choix bourrée de fine laine et ils n’en sortaient point.

Elle-même s’en étonnait.

— Chétifs, vous me donnez bien de la peine et pourtant vous êtes rois.

Qu’elle fût à la maison avec eux, où qu’elle fût au lavoir, ou qu’elle fût à la chapelle, toujours son esprit était, pour eux, en travail de nouveauté.

— Je mettrai à Lalie un ruban bleu… Elle est blanche, elle grandit trop ; je lui ferai de l’eau rouillée pour lui donner de la force. Jo est content quand il me tape sur la tête. Je puis jouer avec lui