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LE PETIT POUCET.

s’approcha du lit où étaient les petits garçons, qui dormaient tous, excepté le Petit Poucet, qui eut bien peur lorsqu’il sentit la main de l’ogre qui lui tâtait la tête, comme il avait tâté celle de ses frères. L’ogre qui sentit les couronnes d’or : Vraiment, dit-il, j’allais faire là un bel ouvrage ! Je vois bien que j’ai bu trop hier au soir. Il alla ensuite au lit de ses filles, où, ayant senti les petits bonnets des garçons : Ah ! les voilà, dit-il, nos gaillards ; travaillons hardiment. En disant ces mots, il coupa, sans balancer, la gorge à ses sept filles. Fort content de cette expédition, il alla se recoucher auprès de sa femme. Aussitôt que le Petit Poucet entendit ronfler l’ogre, il réveilla ses frères, et leur dit de s’habiller promptement et de le suivre. Ils descendirent doucement dans le jardin et sautèrent par-dessus les murailles. Ils coururent presque toute la nuit, toujours en tremblant et sans savoir où ils allaient. L’ogre s’étant éveillé, dit à sa femme : Va-t’en là-haut habiller ces petits drôles d’hier au soir. L’ogresse fut fort étonnée de la bonté de son mari, ne se doutant point de la manière qu’il entendait qu’elle les habillât, et croyant qu’il lui ordonnait de les aller vêtir. Elle monta en haut, où elle fut bien surprise lorsqu’elle aperçut ses sept filles égorgées et nageant dans leur sang. Elle commença par s’évanouir (car c’est le pre-