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LES LUNETTES DE GRAND’MAMAN.

avoir ?… Je tâchais de regarder par de petits trous percés au centre de la porte, mais je n’arrivais pas à distinguer grand’chose… J’eus alors l’idée de l’entr’ouvrir un peu, juste pour y passer la tête… Ah bien, oui ! Le verrou ne fut pas sitôt tiré, qu’une masse énorme se précipita, me forçant à lâcher prise…

Fou de peur, je m’enfuis en criant dans le jardin, où une truie, suivie de ses petits, me poursuivit en grognant d’un air féroce.

Je perdais la tête à ce point que l’idée ne me vint pas de regagner la maison. Je courais ! je courais ! tout en retournant à chaque instant la tête, afin de m’assurer que l’affreuse bête n’était pas sur mes talons. Je crois que de ma vie je n’ai couru si vite que cette fois-là.

Mais en regardant sans cesse en arrière, j’allais au hasard… Tout à coup je sentis le terrain manquer sous mes pas, je fis un plongeon qui me sembla interminable, ma tête heurta un corps dur, l’eau éclaboussa la truie, qui s’enfuit en se secouant… et moi… eh bien, moi… quand je pus ouvrir les yeux, je m’aperçus que j’étais dans un tonneau d’arrosage.

Mes cris attirèrent enfin le père Boisson et Gertrude, occupés à déjeuner. On me repêcha. Le vieux jardinier me