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LES LUNETTES DE GRAND’MAMAN.

les trouvant trop en vue. Je mis deux jolies pommes d’un côté, bourrant un peu pour les faire tenir, car ce jour-là précisément, par un concours de circonstances particulières, il y avait déjà dans mes poches de culotte un tas de choses.

L’autre côté, moins encombré, put recevoir une douzaine de pruneaux, une poire un peu trop mûre qui s’affaissa complaisamment quand j’appuyai dessus, un tout petit raisin et quelques noisettes.

Ainsi lesté, je regagnai sans bruit la porte, non sans avoir fait aux richesses que je venais de découvrir un signe d’amitié et la promesse de nouvelles visites ; puis, je descendis l’escalier à pas de loup.

J’étais légèrement inquiet, et, sans trop bien savoir pourquoi, j’aurais donné beaucoup pour me trouver dans le jardin. J’en tenais déjà la porte après avoir franchi rapidement le vestibule, lorsque la voix de ma grand’mère, s’élevant tout à coup, me cloua à ma place ; elle m’appelait…

Ici j’éprouve quelque hésitation, je l’avoue, et, si je n’étais lié par une promesse qui doit m’être sacrée, je passerais sous silence ce qui va suivre.

Ah ! c’est que c’est joliment dur à raconter.

On dit que, suivant la nature des gens, ils apaisent ou