quelquefois les yeux, acheva de me désespérer :
mes larmes faisaient mon unique ressource.
Vingt fois je fus sur le point d’intéresser la
générosité de sieur Valérie, pour me faciliter une
retraite dans quelque cloître ; mais un reste de
fierté, supérieur à mes malheurs, me rappelait
sa cruelle réponse à ma lettre. Non, souffrons,
me disais-je à moi-même : ils ne jouiront pas de
mes peines. Ma maladie, qui n’était d’abord
qu’une fièvre lente, devint sérieuse par le refus
obstiné que je fis d’y apporter remède : mon
chagrin m’avait familiarisée avec les idées d’une
fin prochaine ; la crainte de la mort, dont j’étais
autrefois si effrayée, s’était évanouie ; je ne me
la représentais plus que comme le terme de mes
douleurs. Lorsque je fus cependant accablée
par le mal, on fit de moi ce qu’on voulut : après
avoir été saignée quatre fois, j’eus un transport
des plus violents, dans lequel la Remy eut
toutes les peines du monde à empêcher que je
ne me jetasse par la fenêtre. Comme il était
minuit sonné, elle appela, dans son effroi, un
nommé Gerbo qui occupait un mauvais
cabinet au-dessus du mien, et le pria pour
Dieu de l’aider à me tenir dans la chaleur
de l’accès. Ce petit service lui valut un éclaircissement
sur l’origine de ma maladie, et la
difficulté de me procurer les soulagements
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LES ÉGAREMENTS