laissant de réflexion que sur le besoin qu’on pouvait
avoir de lui, il m’ouvrit, et me demanda
avec étonnement ce qui m’était arrivé. Quoi que
vous ayez pu faire dernièrement, monsieur, lui
dis-je, pour éluder les remerciements que j’avais
à vous faire, je n’avais garde de me méprendre
sur ce que vous paraissiez vouloir ignorer. Vous
avez goûté dans toute la délicatesse le plaisir
d’obliger, laissez-moi ressentir à mon tour celui
de la plus vive reconnaissance, en vous communiquant
les heureuses nouvelles que je reçois
à l’instant même. Vous m’avez rendu la vie par
votre générosité, ayez encore la satisfaction
d’apprendre à quel point le sort me favorise
aujourd’hui : et après lui avoir détaillé les malheurs
que j’avais éprouvés, et dont je voyais si
heureusement la fin, je lui présentai les trente
louis de M. Poupard, dont je le priai avec toutes
les instances imaginables d’user librement. Heureux
et doux moment que celui où l’on peut témoigner
sa gratitude ! Quelques efforts que je
fisse, il ne voulut jamais recevoir que les deux
louis qui m’avaient été d’un si grand secours.
Quel plaisir n’eus-je point à lui avouer combien
il m’avait soulagée ! Avec quel transport ne lui
déployai-je pas les replis d’un cœur sensible !
Une âme anéantie, étouffée par la misère, ne se
développe jamais si avantageusement que dans
la prospérité.
Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/278
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
254
LES ÉGAREMENTS