Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
15
DE JULIE


ques jours. J’avais passé pour une enfant de huit ans, au sujet duquel on n’avait pas fait de difficulté : ainsi ce fut par cette raison qu’en me présentant je vis des visages altérés, qui ne me reçurent dans la voiture qu’avec crainte d’être embarrassés de ma personne. On pacifia cependant jusqu’à ce que les cahots eussent secoué chacun dans son assiette, aux dépens d’une circulation de coudes et de têtes qui s’entrechoquaient à chaque secousse. Le hasard voulut que nous fussions près d’un de ces béats faits pour la quiétude, qui ne se prêtent qu’à eux-mêmes ; de sorte qu’à la première lieue il pria avec onction ma tante de le délivrer de la proximité de son fardeau, dont les seules approches le jetaient dans une inquiétude continuelle. Un jeune Lieutenant d’infanterie, qui était à notre gauche, moins douillet que le Prélat, offrit galamment de me prendre de moitié sur ses genoux : la politesse ordinaire nous faisant craindre d’abuser de la sienne, nous le fit remercier de son offre, quelque bonne envie que j’eusse de l’accepter ; et jusqu’à la dînée j’achevai comme je pus la matinée aux dépens de mes fesses, qui se trouvaient déjà fort offensées de l’opiniâtreté avec laquelle nous refusions de me mettre à mon aise. Comme dans tout ceci j’étais la partie souffrante, et que je ne pouvais