Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/35

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
19
DE JULIE


plus libres distractions. Cette soirée fut selon moi la plus jolie de toutes les soirées. Qu’une ardeur longtemps prolongée laisse d’agréables imperfections ! La voiture étant enfin arrêtée, on entendit chacun reprendre ses esprits par des bâillements naturels, auxquels j’eus soin d’en mêler de très affectés ; et me rhabillant avec surprise, je demandai civilement à mon fauteuil si je ne l’avais point incommodé. Son esprit vif et badin lui fournit à ce sujet mille plaisanteries qui ne pouvaient être entendues que de lui et de moi. Plus il me témoigna d’attention, et plus je me glorifiai de ma conquête : les soins d’un uniforme me flattaient, et plus encore l’attention qu’ils m’attiraient ; car on me faisait de plus en plus des politesses, dont j’avais en partie obligation à la lieutenance.

Nous mîmes bientôt notre amour en règle par l’usage ordinaire des serments, dont on cimente la constance et la fidélité. Notre voyage, qui dura quatre jours, ne fut qu’une répétition continuelle de ces riens amusants qui ne servent ordinairement qu’à irriter nos désirs. Nous arrivâmes enfin dans Paris, dont le tumulte me surprit avec raison : occupée à regarder les embarras, la quantité prodigieuse des carrosses, la circulation de l’infanterie, et pour tout dire ce