fenêtres du premier étage. Cet accident me rendit
inconsolable ; j’étais aussi curieuse de lire
le billet qu’inquiète de ce qu’il allait devenir le
lendemain. Je me figurais déjà un peuple de
dévotes, qui, après l’avoir lu, allaient saintement
travailler à me faire endiabler : elles tenaient
le premier, nous occupions le second ;
ainsi elles auraient bientôt conclu. Ces sortes
de gens, qui acquièrent toujours de pieuses
lumières sur les défauts du prochain, ne font
jamais grâce du zèle religieux avec lequel la
secte se croit en droit de les publier. Je désespérais
de sortir d’embarras, lorsqu’à force d’examiner
je m’aperçus que, ayant fort peu retiré de
ma dentelle, elle pouvait bien en bas n’être pas
si haute qu’on n’y pût atteindre avec quelque
chose : ainsi, toute en chemise que j’étais, je
descendis l’escalier en tremblant, armée d’un
manche à balai, avec lequel j’agitai de mon
mieux le bout de dentelle auquel était attaché
le billet. Je m’en rendis enfin maîtresse, non
sans une alarme générale. Une vieille voisine
que le diable avait sans doute clouée à sa fenêtre,
ayant vu dans l’obscurité quelque mouvement
et entendu quelque bruit à la porte, se mit
à crier au voleur : j’en frissonne encore quand
j’y pense ; à une heure après minuit dans les
rues, je crus être perdue, et ne m’imaginant pas
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LES ÉGAREMENTS