unes que les autres. Nous passions alternativement
de la langueur à la vivacité, et de la vivacité
à la langueur ; mais notre rhétorique fut
bientôt à bout, soit que l’obscurité altérât notre
éloquence, soit que nous eussions épuisé tous
les lieux communs du langage de Cythère, l’ardeur
du désir éteignit le feu de l’expression.
Un moment de silence fit un entr’acte, pendant
lequel ses mains rencontrèrent les miennes ;
mais comme pour la forme j’essayais faiblement
de les retirer, sa bouche collée sur mes lèvres
m’en ôta la force. Notre conversation recommença
par un finissez donc, que mes soupirs entrecoupaient,
et auquel il avait soin de répondre
par un geste continuel, dont je ne me défendais
que bien certaine qu’il ne m’obéirait
pas ; joint à cela que j’étais fort à mon aise,
par il ne me restait de mon déshabillé qu’un
petit jupon de bazin, dont notre agitation rompit
les cordons. Il semble que le diable choisisse
toujours cet instant pour faire quelques
niches aux filles ; mon amant en profita : nous
étions au pied du lit, il me prit… Je ne pouvais
crier sans réveiller ma tante… Oui, il me
prit entre ses bras, et me renversa sans pitié sur
mon lit, où il se trouva aussitôt que moi. Le
traître ne m’y tenait plus les mains… occupé à
vaincre une résistance qui augmentait le prix de
Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/78
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
62
LES ÉGAREMENTS