je le réduisais ; qu’il était bien douloureux,
pour un homme rempli de sentiments comme
lui, de se voir la dupe de sa bonne foi ; qu’enfin
j’avais toujours été maîtresse de régler sa
conduite à mon égard, et qu’il avait cru remarquer
dans mes manières une façon de penser
toute opposée à celle que mon mari lui avait voulu
faire entendre. À ces quatre mots artistement
prononcés, je ne me possédai plus de colère et
de surprise ; je le pressai de m’expliquer ce
discours, qui n’était pour moi qu’une énigme
perpétuelle. Après s’être fait beaucoup prier il
se rendit enfin, et me dit ce qui suit :
Vous avez sans doute remarqué, madame, avec quelle opiniâtreté votre mari s’est depuis un temps acharné à nous témoigner sa mauvaise humeur : vous fûtes témoin de la dernière scène qui se passa, et en même temps l’unique sujet de la modération que j’y fis paraître. Non content de vouloir vous priver du commerce du monde, il veut sans doute encore affliger tout le genre humain. Il n’y a plus de biais, il veut s’afficher : il faut être décrâné pour venir de but en blanc me faire l’incartade qu’il me fit avant-hier. J’en suis fâché pour lui, mais ma foi, on n’est pas toujours prudent ; il s’y est exposé : on ne s’est jamais imaginé de rendre les intentions de sa femme du ton dont il le