Page:Perrin - Notice sur les travaux scientifiques de Jean Perrin, 1923.djvu/29

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icables.

Bien entendu, les grains de l'émulsion doivent être identiques, et le poids «efficace» de chaque grain est égal au poids de ce grain diminué de la poussée due au liquide environnant, selon le principe d'Archimède.

Donc, de façon précise, il faudra rechercher : S'il se réalise une répartition d'équilibre, les grains étant d'autant plus rares qu'ils sont à un niveau plus élevé, par antagonisme entre la pesanteur qui sollicite les grains dans un même sens, et le mouvement brownien qui les éparpille sans cesse ; Si, dans cette répartition d'équilibre, la même élévation, à partir de n’importe quel niveau, s'accompagne de la même raréfaction ; Si enfin cette élévation qui entraîne une raréfaction donnée varie avec l'émulsion, en raison inverse du poids efficace du grain.

Dès lors, s'il faut s'élever, par exemple, seulement de 5 microns, c'est-à-dire 1 milliard de fois moins que dans l'oxygène, pour que les grains deviennent 2 fois plus rares, c'est que le poids efficace de chaque grain est 1 milliard de fois plus grand que celui de la molécule d'oxygène. Ce qui nous donne le poids de cette molécule d’oxygène, donc le nombre d'Avogadro, et tous les poids des molécules ou des atomes. Des granules encore visibles auront formé le relais indispensable entre les objets qui sont à notre échelle et les molécules ou les atomes.

Réalisation.

– Il fallait d’abord savoir préparer des grains identiques. Pour cela ,j'ai précipité par l'eau des solutions alcooliques de résines (gomme-gutte ou mastic), ce qui donne des émulsions de sphérules vitreuses de toutes dimensions, que j'ai triées par centrifugation fractionnée. J'ai fait la théorie (36) de ce fractionnement qui exige de la patience et du temps. Plusieurs mois sont nécessaires pour obtenir des lots suffisamment uniformes. Le contrôle de cette uniformité se fait en examinant au microscope les surfaces régulièrement couvertes de sphérules jointives que laisse en s'évaporant une gouttelette d'émulsion de grains égaux. On a du même coup, en comptant les sphérules qui s'alignent sur une longueur mesurable ou qui recouvrent sans lacunes une aire mesurable, un moyen précis de connaître le diamètre des sphérules de l'émulsion. On mesure facilement d'autre part la densité de la résine vitreuse qui les constitue. Le poids efficace du grain s'ensuit[1]. Ayant ainsi des émulsions de sphérules égaux, on emprisonne une gouttelette

  1. Je passe sur d'autres procédés qui déterminent également, de façon concordante, le poids du grain.