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Fluctuations.

– Enfin je veux signaler comment la notion de compressibilité osmotique permet de contrôler la théorie de Smoluchowski sur les fluctuations de densité que produit l'agitation moléculaire dans un fluide de densité moyenne connue[1].

Selon cette théorie, la «fluctuation» (n – n0)/n0 dans un volume qui contient par hasard n molécules alors qu'il en contiendrait n0 si la répartition était uniforme, a une valeur moyenne qui se calcule[2] quand on connaît la compressibilité du fluide, et où figure le nombre d'Avogadro.

René Costantin a eu l'idée heureuse d'appliquer cette théorie (invérifiable pour les fluides ordinaires à molécules invisibles) à nos émulsions de grains égaux, considérées comme fluides à molécules visibles. Les mesures de compressibilité osmotique, faites jusqu'à la teneur de 7 pour 100 pour l'émulsion précédemment étudiée, ont permis de voir que la théorie de Smoluchowski se vérifie, donnant environ 60.1022 pour valeur de N.

THÉORIE CINÉTIQUE DU MOUVEMENT BROWNIEN

C'est grâce au mouvement brownien que s'établit la répartition d'équilibre d'une émulsion, d'autant plus rapidement que ce mouvement est plus actif. Mais cette plus ou moins grande rapidité n'importe pas pour la répartition finale. Aussi avons-nous pu étudier, comme on vient de le voir, l’état de régime permanent, sans faire aucune mesure sur le mouvement brownien.

On doit, d'autre part, à Einstein (et, indépendamment, bien qu'un peu plus tard, à Smoluchowski) une théorie du mouvement brownien, établie dans le même esprit que la théorie cinétique des gaz, et qui se prête aux vérifications. Sans s'inquiéter du trajet infiniment enchevêtré que décrit un grain pendant un temps donné, ces physiciens caractérisent l’agitation par le segment rectiligne qui joint le point de départ au point d'arrivée, et qui, en moyenne, est évidemment d'autant plus grand que l'agitation est plus vive. Ce segment sera le déplacement du grain pendant le temps considéré.

Si alors, comme le suggère l'observation qualitative, on admet que le mouvement

  1. Acad. Sciences, Cracovie, déc. 1907.
  2. Par des considérations de thermodynamique statistique.