Page:Perrot - La Grève de Pordic ou la Pordicane, 1872.djvu/23

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Mais, ô déception !… sur un bateau bien frêle
Nous venions de monter, quand l’aurore si belle
Tout-à-coup s’assombrit. Le vent mugit, le flot
Tout d’abord si tranquille, en longs sillons bientôt
Se soulève et déferle avec un bruit sauvage,
Où perd tous ses efforts l’impuissant équipage.
La voile qui sur mer est l’aile de l’oiseau ;
La voile, il faut l’abattre, ou bien notre tombeau
Pouvait s’ouvrir soudain ; car la barque penchée,
Au fluide ambiant allait donner entrée.
Restait le gouvernail, mais tout seul que peut-il ?
Contre vents et courants, quelle force aura-t-il ?

Un espoir cependant nous rassurait un peu,
(Et grâce en soit rendue à la bonté de Dieu ;)
Le rivage était proche, et la fougueuse brise
Tout droit nous y poussait. Mais la douteuse crise
Allait-elle être heureuse ? En attendant la mer,
Sur nous avec fureur lançait son flot amer.
Pourrions-nous aborder assez tôt ? car ma vie
Semblait de l’estomac partir endolorie.

Oh ! le souffle vital, qu’est-il au corps humain ?
Comme il tient à bien peu. Mais là haut une main
Veille, pour qu’il résiste au milieu des orages.