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Page:Pert - Charlette.djvu/76

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Incapable d’une action vile, Jean Hallis possédait la force irrésistible que donnent une perspicacité naturelle et aiguë, un esprit net, calculateur, audacieux, une énergie permanente et égale, une volonté qui jamais ne fait défaut, une persévérance inlassable, et une modestie réelle, c’est-à-dire une connaissance sévère et complètement juste de lui-même.

Jusqu’à vingt-quatre ans, il fut l’amant de madame Ascani et de beaucoup d’autres, semblant n’exister que pour le monde, le flirt, et les jouissances sensuelles, ne publiant pas une ligne, ne gagnant pas un sou, se contentant — avec des miracles d’économie — de ce que lui envoyait madame Dalayrac, dévouée et confiante en l’avenir. C’était d’elle qu’il tenait sa volonté têtue.

Voulant peindre la vie, il avait voulu vivre auparavant. D’ailleurs, en cachette, il écrivait sans relâche, déchirant tous ses essais, s’étudiant, se préparant en sourdine, décidé à ne descendre dans l’arène que lorsqu’il serait sûr de lui, persuadé qu’aucun génie n’éclot sans études acharnées et sans habiles préparations.

Un soir, dans le salon de madame Ascani, le directeur d’un journal qu’on allait prochainement lancer se désolait du manque de jeunes talents inconnus, qui forçaient à remplir le « rez-de-chaussée » d’une feuille avec de la « reproduction