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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/116

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Elle releva son beau regard humide sur le jeune homme et lut tant de sympathie et de sincère émotion sur son visage qu’elle alla à lui instinctivement et se suspendit à son bras.

— Tu es bon, murmura-t-elle, pensive.

Il lui parlait gravement, avec tendresse, comme il se fût adressé à une femme :

— Il ne faut pas pleurer, souffrir et se désespérer, Cady… même lorsqu’on croit que les circonstances qui nous entourent sont particulièrement douloureuses et les gens indifférents, ou méchants et cruels… Il faut prendre la vie telle qu’elle est, courageusement et surtout toujours rester persuadé qu’il y a quelque part des êtres meilleurs et qui peuvent un jour devenir utiles et secourables… Il faut croire que des heures viendront où l’on sera heureux… Oui, il est triste et injuste que l’enfance ne soit pas chérie, choyée, préservée de tout chagrin, de toute décevance… Mais c’est comme cela, dans toutes les familles. Moi aussi, Cady, j’ai été enfant et j’ai été malheureux… Mon foyer était bien maussade, et pourtant, je ne saurais vous dire dans quel désespoir je suis tombé lorsque — j’avais à peine huit ans l’on m’a conduit dans un collège où je devais rester pensionnaire — prisonnier — onze ans de ma vie !… Quelles larmes j’ai versées, la nuit, enfoncé sous mes draps !… Quelle existence affreuse, décolorée, fastidieuse, exaspérante j’ai menée !… Sans une affection, sans une caresse !… Et je ne me suis pas endurci comme tant de mes compagnons… Je ne suis pas devenu une petite brute révoltée, cynique, ricanante devant la détresse des autres, et niant, usant la sienne propre… Mais j’avais fini par prendre mon parti résolument de ma misère actuelle, et je mettais tout mon espoir dans l’avenir… dans les êtres que je rencontrerais plus tard, hors de cette geôle, et parmi lesquels, sans doute, je trouverais, à un moment donné, celui ou celle ou ceux qui m’appor-