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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/128

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— C’est la première fois que vous conduisez Mlle Darquet ici ? demanda-t-il.

Elle devina dans ces mots un imperceptible blâme et rougit, répondant avec précipitation :

— Oh ! ce n’est pas moi qui l’ai amenée… Son père, M. Darquet, est avec nous, et il va nous rejoindre.

— Ah !

Il jeta les yeux autour de lui et remarqua, souriant de l’air dépaysé de l’institutrice :

— C’est une cohue assez amusante.

— Un peu effrayante, répondit-elle avec une timidité qui n’était pas jouée.

Les types les plus divers se coudoyaient dans cette salle rastas, provinciaux, quarts de mondaines, honnêtes familles bourgeoises venues pour observer le « grand monde », artistes, professionnels des deux sexes de vices spéciaux.

Précisément à cette minute, la corpulente silhouette du député se dressa au-dessus des tables. Il aperçut Mlle Armande, sourit et fonça, la main tendue.

— Tiens, c’est vous, Deber ?… Et ma gamine, que diable en avez-vous fait ?

Le fonctionnaire répondit avec une ironie que l’autre ne remarqua point :

— Elle est au fumoir, en train de faire des études comparées d’humanité et d’alcools en compagnie de Jacques Laumière.

— Ah ! parfait ! dit Darquet avec indifférence.

Et il s’installa tout contre Mlle Armande, son gros pied écrasant la bottine de celle-ci.

— Je viens de faire connaissance de la plus jolie femme de Paris, commença-t-il, l’œil brillant, la lèvre inférieure gourmande, gonflée et tremblotante.

Mais Cady, qui arrivait sans qu’on l’eût aperçue, se jeta sur une chaise, pâle, le regard étrange.

— Oh ! papa, s’écria-t-elle d’un ton crispé. Je