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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/132

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de sa mère, en l’absence du député, de ses secrétaires et de tout invité étranger.

Le babil inécouté de l’enfant, le sourire indulgent et distrait de Mme Darquet enveloppaient la fillette d’une paix, d’une joie discrète, mais profonde, pareille à l’odeur attendrissante des roses de la veille, pâlies, un peu fanées, mais encore si jolies, qui décoraient la table.

Lorsqu’elles se levèrent, Baby supplia :

— Maman, veux-tu permettre que je vienne dans ta chambre pour jouer avec tes bijoux ?

Mme Darquet caressa la tête blonde de la petite qui se pressait contre elle avec une effusion intéressée.

— Si tu veux.

Un désir presque douloureux élança Cady. Elle balbutia, timide, les yeux attachés sur sa mère, avec subitement le vif et cruel sentiment du mur de glace qui les séparait, qui la faisait employer le « vous » cérémonieux avec celle que la cadette tutoyait :

— Et moi, maman ?… Puis-je venir aussi ?

Mme Darquet la regarda avec étonnement, hésita, puis acquiesça, ironique.

— Oui… Si tu retombes en enfance.

Cady baissa la tête et suivit silencieusement le groupe enlacé de sa mère et de Baby, qui pépiait comme un oiselet échappé de sa cage. Dans la vaste pièce aux meubles lourds et opulents, aux tentures sombres, mais où, néanmoins, flottait le parfum, régnait l’indéfinissable atmosphère de la femme qui fut jolie et galante, Mme Darquet, enfoncée dans un fauteuil profond, s’absorbait dans la lecture et la correction d’un projet de rapport financier concernant une de ses œuvres charitables.

Jeanne allait et venait, importante et affairée, du chiffonnier-secrétaire à la table sur laquelle elle disposait les écrins et rangeait les bijoux, de petits doigts adroits et précautionneux de précoce femme-