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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/135

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indicible émotion à retrouver l’image d’une bête vue et touchée par elle-même autrefois, à côté de cet inconnu.

Jik ? Oui, c’était bien le chien marron et blanc qui jouait avec elle. Où et quand ? Elle ne pouvait préciser. Ce souvenir, bien que très vif, se perdait dans un lointain très éloigné, où ses yeux de toute petite ne s’ouvraient que pour certaines visions restreintes et négligeaient l’ambiance.

Quel pouvait être ce jeune homme qui tenait ainsi Jik familièrement sur lui ?

Elle avait beau fouiller ses souvenirs, elle ne pouvait lui assigner de place parmi les silhouettes de gens aperçus jadis à la maison paternelle, ou chez sa grand’mère.

Dans la jeune femme de la voiture, du canot, assise dans la prairie, seule sous les vieux chênes, elle n’avait pas tardé à retrouver Mme Darquet.

Plus mince, plus élancée, plus nerveuse qu’aujourd’hui, avec un air d’entrain et de folie qui la différenciait grandement de son aspect actuel, mais néanmoins facilement reconnaissable à la fière coupe de son visage aux sourcils arqués, à la courbe du nez et à la beauté des yeux.

Cady rechercha une loupe aperçue naguère et étudia les photographies au verre grossissant. Et, soudain, une émotion l’étreignit, une idée folle l’envahit devant les traits si caractéristiques du jeune homme de la voiture et du livre.

N’était-ce pas un frère qu’elle avait eu sans qu’elle en eût jamais entendu parler, et qui serait mort ?

En vérité, ces traits, ce profil, c’étaient les siens à elle !… Cet ovale allongé, ce front, ce pli amer et désabusé de la bouche, ce regard indicible… et aussi, cette attitude spéciale pour lire, le buste courbé, les jambes entrelacées, le corps souple recroquevillé sur lui-même… c’était ainsi qu’elle se posait !…

Ce jeune garçon — car, imberbe et délicat il lui