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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/99

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regarda, surprise de se reconnaître et se trouver en même temps si nouvelle… Et un orgueil, une joie éperdue gonflèrent son cœur, débordèrent en un flot triomphant, vainqueur, insolent, qui chassa l’effroi de naguère, la vague pudeur instinctive, et l’appréhension plus réfléchie que sa gracilité d’adolescente ne fût pas à la hauteur de l’espoir de l’ami !…

— Je suis prête ! cria-t-elle d’une voix frémissante, qui chantait toute l’allégresse de l’Eve se découvrant.

Il répondit brièvement, presque maussade :

— Eh bien, arrive !…

Sans avoir besoin de le voir, elle comprit à son accent qu’il subissait un sentiment analogue à celui qui l’emplissait elle-même tout à l’heure. Il regrettait et redoutait l’épreuve qui, peut-être, le désillusionne- rait à jamais sur la valeur physique secrète de ce petit être dont l’âme et les sens l’intéressaient si étrangement.

Elle se glissa hors du paravent et avança, posant ses pieds nus avec précaution sur la haute laine du tapis, relevant d’une main sa robe trop longue et, de l’autre, en un geste heureux, soutenant sa lourde coiffure mal équilibrée.

Le peintre reçut le choc inoubliable de cette silhouette hardie de jeune corps svelte, qui avait de l’éphèbe toutes les grâces troublantes et de la femme d’indicibles promesses voluptueuses.

D’un coup d’œil rapide, elle mesura le trouble éperdu de l’homme et sentit s’épandre en elle la conscience de sa suprême force tranquille de femme.

— Je ne peux pas arriver à faire tenir cette coiffure ! dit-elle d’un accent boudeur et dont elle exagérait volontairement le ton enfantin et la sécurité candide.

Jacques reconquit d’emblée tout le calme apparent qui lui était nécessaire.

— Approche, je vais t’aider.