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J’ai débute dans le Bordeaux-Paris de cette année-là. Je ne fus pas heureux. Je ne tiens pas à rappeler des incidents regrettables . Je mentionne mes débuts, et voilà tout. Et cela simplement parce que, du jour où je prie contact avec les champions de la route, les Georget et autres, je fus persuadé que j’avais trouvé enfin ma voie.

Mais, j’attendis encore quelque temps avant de me lancer dans la carrière. La piste m’attirait toujours. Je me sentais des dispositions que je n’avais peut–être pas… Je gagnai une course de six heures, puis le Bol d’Or, je gagnai d’autres courses encore, chaque fois que Pottier n’était pas en ligne… Car j’avais une peur horrible de ce pauvre garçon. C’était plus fort que moi et j’étais émotionné chaque fois que je savais devoir le rencontrer.

Je ne dormais plus la veille et même l’avant-veille des courses. Affaire de nerfs probablement. Mais en tout cas, tempérament insupportable qui me valut quelques amères déceptions.

Et puis, je vous l’ai conté, la piste me faisait faire des bêtises. J’avais toujours peur de n’être pas assez préparé. Je m’entraînais furieusement. Toujours trop. Tant et si bien que le jour de la course il n’y avait plus d’homme et que le moral était au-dessous de tout.

C’est depuis que je me suis complètement adonné à la route que j’ai réussi à me débarrasser quelque peu de l’émotion qui m’étreignait à chaque départ de course.

Et c’est le Tour de France qui m’a donné une confiance que je ne possédais point.

Voici les faits : la première année que je le disputai c’était en 1905, l’année de Trousselier. Je partis sans aucune chance sérieuse de triompher car l’entraînement le plus élémentaire me faisait défaut : j’étais à l’époque, caserné à Langres pour dix mois.

Est-ce parce que je n’avais aucune espérance que je marchai si bien ? À vous de conclure. Toujours