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TABLEAU

donnée à Blanche : elle eut le pouvoir de composer le conseil, de choisir les grands baillis, et de conférer les bénéfices, honneurs qui ne la flattoient plus, puisqu’elle ne devoit pas les partager avec son fils, et qu’elle n’acceptoit que pour consacrer les derniers momens de sa vie à le servir. Elle ne put encore se séparer de lui dans ce lieu. Avide de jouir des momens qui lui restoient pour rassasier ses yeux de la vue de ce fils chéri, elle voulut le suivre jusqu’à l’abbaye de Cluny, sur le territoire de laquelle l’armée devoit se rassembler. Ce fut dans ce monastère célèbre, où tout sembloit inviter au détachement des choses humaines, qu’ils se firent leurs adieux. Ils ne purent trouver de soulagement à leur douleur qu’au pied des autels du Dieu que Louis alloit servir : et, malgré la ferveur dont leurs cœurs étoient pénétrés, cette dernière séparation fut déchirante : ils ne devoient plus se revoir sur la terre.

Louis, ayant quitté sa mère, se mit à la tête de son armée : il étoit alors âgé de trente-trois ans : sa taille avantageuse le faisoit paroître avec éclat devant des troupes qu’il avoit déjà conduites à la victoire : la délicatesse de sa santé rendoit sa physionomie plus intéressante ; ses cheveux étoient blonds, et coupés courts suivant la mode du temps ; la simplicité de ses vêtemens le distinguoit des autres chefs. L’armée le reçut avec des transports de joie, et se mit en marche pour Aigues-Mortes port du Bas-Languedoc que Louis avoit fait creuser.

Je ne ferai qu’un récit succinct de cette croisade dont Joinville a donné tous les détails, et nous ne