Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 2.djvu/231

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mesme il gette ses branches çà et là parmy le païs d’Egipte. Et quant ce vient le temps d’environ la Saint Remy, se espandent de lui sept branches en rivieres, qui quierent les terres plaines[1]. Et puis quant les eauës se sont retirées, les laboureux du païs viennent labourer la terre aprés le cours de l’eauë o charrues sans roes, et sement là fromens, orges, ris, commins, et y viennent si bien, que ou ne sauroit que amender[2] . On ne sceit dont celle crue vient, fors que de la grace de Dieu. Et si elle n’estoit, il ne viendroit nulz biens ou païs d’Egipte, pour les grans chaleurs, qui y reignent, pour ce qu’ilz sont prés du souleil levant, et n’y pleut comme point, et de loing à loing. Celui fleuve est tout trouble de la presse que y mainent les gens du païs, et autres, vers le soir, pour avoir de l’eauë à boire. Et ne font seulement que escacher[3], en celle eauë qu’ilz y prennent, quatre amendes, ou quatre febves ; et le landemain elle est tant bonne à boire que merveilles. Quant celui fleuve entre en Egipte, il y a gens tous expers et accoustumez, comme vous diriez les pescheurs des rivieres de ce pays-cy, qui au soir gettent leurs reyz ou fleuve, et és rivieres : et au matin souvent y trouvent et prannent les espiceries qu’on vent en ces parties de par deçà bien chierement et au pois : comme cannelle, gingembre, rubarbe, girofle, lignum aloes, et plusieurs bonnes chouses. Et dit-on ou païs que ces choses-là viennent de Paradis terrestre, et que le vent les abat des bonnes arbres

  1. Quierent les terres plaines : cherchent les terres basses, qui se répandent dans ces terres.
  2. Que amender : que faire de plus.
  3. Escacher : Broyer, briser.