Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 2.djvu/230

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rebellion, que nul de ses gens ne fust tant hardi, qui touchast en mal à ung de ces Turcs Sarrazins que le Souldan avoit envoiez devers lui. Or advint que quant les Sarrazins virent que l’ost du Roy fut esmeu à partir, et que le Roy avoit fait defendre que nul ne les ouzast toucher, ilz s’en vindrent de grant courage tous en ung troppel[1] aux templiers, qui avoient la premiere bataille. Et l’un de ces Turcs-là donna de sa masse à l’un des chevaliers de la premiere bataille, qu’il getta devant les piedz du cheval du frere de Regnault de Bichers, qui estoit leur mareschal du Temple. Quoy voyant le mareschal, il s’escria à ses gens d’armes : « Or avant compaignons ; à eulx de par Dieu, car ce ne pourrois-je souffrir. » Et adonc il fiert son cheval des esperons, et court sus aux Sarrazins, et toute la compaignie de l’ost aussi. Et saichez que les chevaulx des Turcs estoient tous foullez et travaillez, et les nostres tous frois et respousez ; dont mal leur en arriva. Car j’ay depuis assez ouy dire qu’il n’en eschappa pas ung tout seul que tous ne fussent tuez, ou contraintz de leur getter en la mer et se noier.

Ici convient parler du fleuve, qui passe par le païs d’Egipte, et vient de Paradis terrestre ; car ces chouses faut savoir qui veult entendre ma matiere. Cetui fleuve est divers sur tous autres rivieres ; car quant en une grosse riviere plus y chiet[2] de petites rivieres et de eauës, tant plus s’esparpille la riviere en de lieux à petitz ruisseletz : mais celui fleuve vient tousjours d’une façon, et quant il est en Egipte, de lui

  1. Troppel : troupe serrée.
  2. Chiet : tombe.