Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 2.djvu/281

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

a esté touché cy-dessus. Or advint que après ce fait ung traistre mauvais huissier, nommé Marcel, commença à crier à noz gens à haulte voix : « Seigneurs chevaliers, rendez vous tous ; le Roy le vous mande par moy, et ne le faites point tuer. » A ces motz furent tous effroiez, et cuidoient que le Roy leur eust ainsi mandé ; et chacun rend aux Sarrazins ses bastons et harnois. Quant l’admiral vit que les Sarrazins emmenoient prinsonniers les gens du Roy, il dist à messire Phelippe de Montfort qu’il ne lui asseuroit mye la treve, et qu’il veoit ja que tous ses gens estoient prins des Sarrazins. Et voiant messire Phelippe que tous les gens du Roy estoient prins, il fut bien esbahy. Car il savoit bien, nonobstant qu’il fust messagier de demander la treve, que tantoust il seroit aussi prins ; et ne savoit à qui avoir recours. Or en Paiennie y a une tres-mauvaise coustume. Car quant entre le Souldan et aucun des roys d’icelui païs envoient leurs messagiers l’un à l’autre pour avoir ou demander treves, et l’un des princes se meurt, le messagier, s’il est trouvé, et que la treve ne soit donnée, il sera prins prinsonnier, de quelque part que ce soit, soit-il messagier du Souldan ou du Roy.

Or devez savoir que nous autres, qui estions en noz vaisseaux en l’eauë, cuidans eschapper jusques à Damiete, ne fusmes point plus habilles que ceulx qui estoient demourez à terre. Car nous fusmes prins, comme vous orrez cy-aprés. Il est vray que, nous estans sur l’eauë, il s’esleva ung terrible vent contre nous qui venoit de devers Damiete, qui nous tollut le cours de l’eau, en faczon que ne povions monter : et nous convint retourner arriere vers les Sarrazins. Le