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demoura, ainsi que lui ay depuis oy dire, de tous ses gensd’armes que le bon chevalier messire Geffroy de Sergines, lequel le rendit jusques à une petite ville nommée Casel, là où le Roy fut prins. Mais avant que les Turcs le peussent avoir, luy oy compter que messire Geffroy de Sergines le deffendoit en la faczon que le bon serviteur deffend le hanap[1] de son seigneur, de paeurs des mouches. Car toutes les foiz que les Sarrazins l’approuchoient, messire Geffroy le deffendoit à grans coups d’espée et de pointe, et ressembloit sa force luy estre doublée d’oultre moitié, et son preux et hardi courage ; et à tous les coups les chassoit de dessus le Roy. Et ainsi l’emmena jusques au lieu de Casel, et là fut descendu ou giron d’une bourgeoise qui estoit de Paris. Et là le cuiderent veoir passer le pas de la mort, et n’esperoient point que jamais il peust passer celui jour sans mourir.

Tantoust arriva devers le Roy messire Phelippe de Montfort, et lui dist qu’il venoit de veoir l’admiral du Souldan, à qui il avoit autresfoiz parlé de la treve : et que si c’estoit son bon plaisir, que encores derechief il lui en yroit parler. Et le Roy lui pria de le faire ainsi, et qu’il la vouloit tenir et faire en la maniere qu’ilz le vouloient. Adonc partit monseigneur Phelippe de Montfort, et s’en alla vers les Sarrazins, lesquelz avoient osté leurs toailles[2] de leurs testes. Et bailla le sire de Montfort son anel, qu’il tira du doy, à l’admiral des Sarrazins, en asseurance de tenir les treves ; et cependant, que l’en feroit l'appointement tel qu’ilz l’avoient demandé autresfoiz, comme

  1. Hanap : coupe, tasse.
  2. Toailles : toiles, turbans.