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histoire

le bon roy saint Loys leur respondit autelle[1] et semblable responce à chascune des deux demandes, comme nous avions fait par la bouche du conte Pierre de Bretaigne. Et voians les Sarrazins, que le Roy ne vouloit optemperer à leurs demandes, ilz le menasserent de le mectre en bernicles[2]: qui est le plus grief tourment qu’ilz puissent faire à nully. Et sont deux grans tisons[3] de bois qui sont entretenans au chief. Et quant ilz veullent y mectre aucun, ilz le couchent sur le cousté entre ces deux tisons, et lui font passer les jambes à travers de grosses chevilles : puis couschent la pièce de bois qui est là dessus, et font asseoir ung homme dessus les tisons. Dont il advient qu’il ne demeure à celui qui est là cousché, point demy pié d’ossemens qu’il ne soit tout desrompu et escaché[4]. Et pour pis lui faire, au bout des trois jours lui remettent les jambes, qui sont grosses et enflées, dedans celles bernicles, et le rebrisent de rechief, qui est une chose moult cruelle à qui sauroit entendre : et le lient à gros nerfz de beuf par la teste, de paeur qu’il ne se remue de là dedans. Mais de toutes celles menaces ne fist compte le bon Roy, et leur dist qu’il estoit leur prinsonnier, et qu’ilz pouvoient faire de lui à leur vouloir.

Quant les Sarrazins virent, qu’ilz ne peurent vaincre le Roy par menasses, ilz retournèrent à lui, et lui demanderent combien il vouldroit donner de finance au Souldan en oultre Damiete, qu’il leur rendroit. Et le Roy respondit que si le Souldan vouloit prandre

  1. Autelle : pareille.
  2. Bernicles : torture, sorte de question.
  3. Tisons : poutres, pieux.
  4. Escaché : écrasé, broyé.