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TABLEAU

racheta ; et toute sa cour la suivit, aux acclamations des peuples, depuis Villeneuve, près de Sens, jusqu’à Paris. Vers le même temps, le roi de Navarre partit pour la Terre sainte avec plusieurs seigneurs français, et parut étouffer, dans une expédition malheureuse, la passion qui lui avoit fait faire tant de folies.

En 1240, Louis, âgé de vingt-cinq ans, avoit une réputation de sagesse et de modération qui lui attiroit l’estime de tous ses voisins. Dans un âge si peu avancé, les circonstances et la confiance qu’il inspiroit le rendirent l’arbitre d’un différend qui intéressoit non-seulement la religion, mais le repos d’une grande partie de l’Europe. Les démêlés de l’empereur Frédéric II et du pape Grégoire IX, étoient dans toute leur force ; et les deux partis ne sembloient s’accorder que pour porter leur cause devant le jeune prince.

Cette lutte si longue, qui caractérise le siècle, est une des particularités les plus intéressantes du règne de saint Louis. Il faut donc remonter plus haut, afin d’en montrer l’origine et les développemens.

L’autorité que les papes croyoient avoir sur les peuples et sur les rois, étoit fondée sur de fausses décrétales, ou décrets supposés des anciens papes et des conciles, recueillies au milieu des désordres du huitième siècle, par Isidore, et complétées dans le douzième par le bénédictin Gratien. C’étoit une espèce de droit consacré par l’antiquité, et dont le défaut de critique et de moyens de faire des recherches exactes sur l’histoire, empêchoit de découvrir les bases fragiles. Les papes, depuis quatre siècles, croyoient qu’ils pouvoient légitimement anéantir l’autorité temporelle des princes, lorsque ceux-ci se trou-