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entre la france et l’angleterre.


morne silence. Eustache de Saint-Pierre, maire de Calais, se lève et déclare qu’il se sacrifie pour ses concitoyens ; Jean Daire, son cousin, Jacques et Pierre Wisant, ses parens, deux autres dont l’histoire ne nous a malheureusement pas conservé les noms, imitent soudain ce noble exemple ; ils partent au milieu des gémissemens et des bénédictions des habitans. Edouard n’est point touché de leur dévouement : il jette sur eux un regard sévère, et donne froidement l’ordre de les conduire au supplice. Ses officiers le sollicitent en vain, il est inexorable, et répète l’ordre cruel. Ces généreuses victimes alloient être livrées au bourreau, lorsque la reine Philippe, femme d’Edouard, vient se jeter à ses genoux et le supplie de ne pas souiller sa victoire par un acte inutile de barbarie. Le Roi, cédant à regret, lui remet les prisonniers, qu’elle fait reconduire dans la ville avec une honorable escorte. On a prétendu que l’intention du Roi n’étoit pas de les faire mourir. Mais les historiens anglais eux-mêmes avouent qu’Edouard prononça leur arrêt quand ils furent amenés devant lui. Cet acte de barbarie les étonne dans un prince magnanime, mais ils n’essaient ni de le nier, ni de le justifier.

Edouard pouvoit d’autant moins refuser la grâce des six Calaisiens à la Reine, que cette princesse venoit de lui rendre d’importans services en Angleterre. Pendant son absence, David Bruce, roi d’Ecosse, étoit entré dans le Northumberland à la tête de cinquante mille hommes. La Reine, à la première nouvelle de cette invasion, rassemble des troupes, les conduit elle-même au-devant de l’ennemi, le met en déroute complète ; et ramène David Bruce prisonnier