Evreux ; prévoyant que le Roi ne laisseroit pas ce
crime impuni, il profite du mécontentement général
pour se faire un parti dans le royaume, entre en négociation avec l’Angleterre, fortifie ses places, se
met en état de défense, puis envoie demander à Jean
un pardon que celui-ci ne peut lui refuser. On traite ;
au lieu du châtiment qu’il méritoit, il obtient non-seulement une amnistie entière pour ses agens, mais
encore la cession de plusieurs seigneuries. Il ne
consent à venir faire un simulacre de réparation
qu’après avoir reçu un fils de France en otage. Ce
traité honteux, auquel le roi Jean étoit réduit par
suite de sa mauvaise administration, achève d’avilir
son gouvernement. Charles, enhardi par le succès
d’un premier crime, forme de nouvelles ligues avec
les grands et avec l’Angleterre, jure plusieurs fois la
paix, qu’il rompt aussitôt après l’avoir signée, et remplit le royaume de troubles et de confusion.
Les trêves avoient été successivement prolongées jusqu’en 1355. On négocioit pour une paix définitive ; Édouard affectoit de la désirer vivement, mais il étoit trop habile pour ne pas profiter des désordres qui régnoient en France ; ses démonstrations pacifiques n’avoient d’autre objet que de tromper le roi Jean, et de l’attaquer avec plus d’avantage. Lorsqu’il avoit pris le titre de roi de France, et même après les désastres de la journée de Crécy, aucune province, aucune ville, aucun seigneur français n’avoient embrassé sa cause ; il connoissoit le roi de Navarre, et comptoit peu sur son appui. Mais la guerre civile, prête à éclater dans le royaume, en paralysoit les forces, et suffisoit pour favoriser ses projets d’invasion. Aussitôt