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ANCIENS MÉMOIRES

La dame n’étant pas moins irritée de la désobéïssance de son neveu, que fâchée de sa blessûre, se rendit incessamment dans son logis, où trouvant Bertrand au lit, elle lui fit une reprimande fort sèche sur le méchant ply qu’il prenoit de se commettre tous les jours avec des canailles, et de n’avoir point devant les yeux la noblesse du sang dont il étoit sorty.

Guesclin tâcha de la radoucir de son mieux, en luy representant que sa blessure n’étoit pas dangereuse, ayant plus fait de bruit dans le monde que de mal à luy même, et qu’il esperoit d’en guerir au premier jour. En effet il se vit sur pied au neuviême jour, et quelque temps après ayant fait sa paix avec son père, par le canal de sa tante et de ses amis, il en obtint un petit roussin, sur lequel il montoit ordinairement pour contenter la curiosité qu’il avoit d’aller voir les tournois qui se faisoient dans la province de Bretagne. Il eût bien voulu se mettre sur les rangs avec les autres ; mais comme il étoit trop jeune et trop mal monté, ces deux obstacles ne luy permettoient pas de satisfaire le desir qu’il avoit de se signaler dans cet exercice, sous les yeux d’une foule de spectateurs dont la présence l’auroit encouragé de faire de son mieux pour surmonter son adversaire. Il se contentoit de faire à son pere un récit fort exact et fort agréable de toutes les circonstances qui s’étoient passées dans ces sortes de combats ; et ce jeune homme témoignoit en les racontant prendre tant de goût à ces exercices, que ceux qui l’écoutoient là dessus, et particulièrement son pere, jugerent dés lors que Bertrand feroit un jour un grand fracas dans l’Europe