Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
213
SUR DU GUESCLIN.

duc de Lancastre. Guesclin luy fit une profonde reverence et fléchit un genou devant luy. Ce prince quita tout aussitôt son jeu, releva Bertrand avec beaucoup d’honnêteté, luy demandant quelles affaires l’avoient appellé dans son camp. Chandos ajouta qu’il ne souffriroit pas qu’il s’en retournât à Dinan sans avoir auparavant beu de son vin. Bertrand répondit qu’il n’auroit point cet honneur, qu’auparavant on ne luy eût fait justice sur l’outrage qu’il avoit reçu. S’il y a, dit Chandos, quelqu’un dans l’armée qui vous ait fait le moindre tort, on vous le fera réparer sur l’heure.

Guesclin ne manqua pas d’entrer aussitôt en matière, en représentant au duc de Lancastre et à toute sa cour, qu’au préjudice de la trêve le chevalier Thomas de Cantorbie s’étoit saisy de la personne de son jeune frère, qu’il avoit surpris à la sortie des portes de Dinan, comme il ne songeoit qu’à prendre l’air et se divertir en exerçant son cheval tout seul dans les champs, et que ne s’étant pas contenté de luy faire insulte, il l’avoit forcé de le suivre jusques dans sa tente, où il le faisoit garder à veüe comme un prisonnier ; qu’il les supplioit donc de donner incessamment les ordres nécessaires pour sa liberté. Jean de Chandos prenant la parole, l’assûra que ce ne seroit pas une affaire, et qu’il comptât que non seulement son frere luy seroit rendu, mais aussi que le chevalier Thomas se repentiroit de sa temerité. Le Duc commanda sur l’heure qu’on fît venir le chevalier Thomas devant luy, pour luy rendre compte de sa conduite, et qu’en attendant on apportât du vin pour régaler Bertrand et le faire boire avec eux. Les deux ordres furent promptement exécutez. Bertrand bût à la santé du Prince