Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
ANCIENS MÉMOIRES

percevant qu’Olivier étoit arrêté prisonnier, partit de la main pour en aller avertir Bertrand. Il le trouva dans la grand’place de Dinan où il se desennuyoit à regarder des gens qui joüoient à la longue paume. Ce chevalier, le démêlant au travers de la foule, luy vint dire à l’oreille que Thomas de Cantorbie venoit d’arréter son frère, et l’avoit mené prisonnier dans sa tente sans avoir égard à la sécurité que le bénéfice de la trêve donnoit à tout le monde. Bertrand reçut cette nouvelle fort impatiemment, et regardant ce messager, il luy demanda s’il ne s’étoit point mépris, et s’il connoissoit bien son frère. Il luy répondit qu’ayant eu l’honneur de servir d’écuyer à son propre père, le visage de son frère Olivier luy devoit être bien familier. Bertrand voulut apprendre le nom de l’Anglois qui avoit fait le coup ; il le luy déclina fort juste, en luy disant qu’il s’appelloit le chevalier Thomas de Cantorbie, propre frère de l’archevêque de cette fameuse Église d’Angleterre : Et par saint Yves il me le rendra, dit Bertrand, ne oncques si mauvais prisonnier n’a pris. Il se jetta tout aussitôt sur son cheval et vint à toute jambe au camp des Anglois. La plupart de ceux de l’armée qui le connoissoient, luy firent mille amitiez, luy demandans le sujet de sa venuë. Guesclin, sans s’ouvrir davantage, les pria de luy vouloir bien enseigner où étoit la tente du Duc, auquel il avoit envie de parler. On se fit un merite de l’y conduire. Il y trouva ce prince joüant aux échets avec Jean de Chandos, et qui avoit pour spectateurs Jean de Monfort, le comte de Pembroc et Robert Knole. Tous ces seigneurs firent mille caresses à Bertrand et luy ouvrirent le passage pour le laisser parler à son aise au