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SUR DU GUESCLIN.

faisoit attaquer Mante, ils se feroient ensevelir sous les ruines de la ville, avant qu’il s’en rendît le maître.

Toutes les choses étant ainsi disposées, Guillaume partit avec ses gens dans une nuit bien obscure, et quand il se vit prés de Mante, il mit pied à terre et fit descendre de cheval ceux qui l’accompagnoient, apprehendant que le hannissement des chevaux et le bruit de leur marche ne les fît découvrir, et ne reveillât les bourgeois de la ville. Ils se présentèrent aux barrières à la petite pointe du jour, lors qu’on faisoit l’ouverture des portes pour envoyer les bêtes aux pâturages. Quand quatre bourgeois, qui gardoient les clefs de la ville, eurent ouvert le guichet et la moitié de la barriere, ils apperçurent ces prétendus vignerons un peu éloignez les uns des autres, qui faisoient mine de vouloir entrer pour travailler aux vignes et gagner leur journée. Leur contenance leur paroissoit si simple et si naïve, qu’ils ne balancerent point à leur ouvrir toute la barriere, et se retirerent en suite à leur corps de garde pour y mettre bas leurs armes, et faire sortir les bestiaux ; quatre de ces vignerons travestis passerent la porte, dont six autres qui les suivoient se saisirent aussitôt, et mirent tous ensemble l’épée à la main. L’un d’eux sonna d’un cors qu’il avoit dans sa poche, pour avertir Guillaume de Launoy qui se tenoit là tout auprès dans une embuscade, et n’attendoit que l’heure du signal pour entrer dans la ville avec le reste de ses gens. Il eut l’adresse d’embarrasser le pont avec une charette pour empêcher les bourgeois de le lever sur ceux qui le devoient joindre. De Launoy se jetta dans Mante lors que la plûpart des habitans étoient encore au lit.