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SUR DU GUESCLIN.

avoit pris. Guesclin, mal satisfait d’une réponse si vague, les renvoya sur leurs pas, leur commandant de faire un tric trac dans les bois, dans la pensée qu’il avoit qu’ils y pouvoient être dans une embuscade, pour faire la guerre à l’œil et le surprendre à leur avantage. Il leur donna l’ordre de le revenir trouver à Cocherel, pour luy rapporter des nouvelles. Il sortit aussitôt de cette abbaye ; faisant plus loin quelque mouvement, il disoit sur la route aux officiers qui l’environnoient, qu’il n’auroit ny paix ny repos qu’il n’eût vû de prés les Anglois. Il ajoûta que ces gars y laisseroient la pel, et fussent ores trois contre un. Cet intrepide general jura que s’il y en avoit quelqu’un dans son armée qui fût assez lâche pour prendre la fuite, il le feroit aussitôt brancher au premier arbre, et que s’il y en avoit qui ne se sentissent pas assez de cœur pour bien payer de leurs personnes, qu’ils eussent à le declarer avant le combat et qu’il leur donneroit volontiers congé, de peur que, dans l’occasion, leur crainte ne fût contagieuse aux autres, et ne fît perdre la journée. Tous luy répondirent qu’il n’avoit rien à craindre là dessus et qu’ils étoient bien resolus de le seconder, et de vendre avec luy bien cherement leurs vies aux Anglois qu’ils esperoient de combattre et de vaincre. Ils hâtèrent donc leur marche avec tant de diligence qu’ils arrivèrent le soir même à Cocherel, dans un temps bien chaud. Le succès de la bataille qui s’alloit donner, étoit d’une très-grande importance aux affaires du roy Charles, parce que le captal de Bue avoit affecté d’entrer dans le royaume pour troubler la ceremonie de son couronnement, qui se devoit faire à Rheims le jour de la Trinité, se vantant qu’il feroit