Enfin le roi d’Angleterre fut obligé de céder la Normandie
à Robert, mais il eut soin d’y exciter des
troubles, afin d’avoir un prétexte pour la remettre
sous ses lois. Une plaisanterie de Philippe sur l’extrême
embonpoint de Guillaume, ralluma la guerre,
qui fut d’autant plus animée que le motif en étoit
plus frivole, et le roi d’Angleterre mourut [1083]
avant qu’il y eût eu aucun rapprochement.
Guillaume-le-Conquérant laissa l’Angleterre à Guillaume-le-Roux, son second fils, dont le caractère dur, ferme et cruel, lui paroissoit propre à maintenir des peuples nouvellement soumis. Robert, son fils aîné, eut la Normandie ; il ne donna à Henri, le plus jeune de ses enfans, que des revenus en argent, qui devoient lui être payés par ses deux frères. Robert étant parti pour la Palestine avec les premiers Croisés, Guillaume-le-Roux s’empara de la Normandie, et crut même pouvoir profiter des malheurs de la France, pour envahir le royaume. Philippe I avoit répudié la reine Berthe pour épouser Bertrade, troisième femme du comte d’Anjou, Foulques-le-Réchin, dont le mariage n’avoit pas été cassé, et qui étoit sa parente ; une excommunication prononcée contre lui par le concile d’Autun, fut confirmée par le pape Urbain II. L’excommunication ne rendoit pas, comme on l’a dit, le trône vacant, elle ne délioit pas les sujets du serment de fidélité ; mais, sous un prince foible, elle favorisoit les entreprises des seigneurs qui cherchoient à se soustraire à l’autorité du Roi ; et Philippe, subjugué par sa passion, n’étoit pas en état de les faire rentrer dans le devoir. Le royaume étoit livré à l’anarchie et au pillage ; non-seulement les grands