Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/382

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
377
SUR DU GUESCLIN.

des forces suffisantes pour entrer ouvertement dans son affaire et s’attirer sur les bras une guerre avec les François de gayeté de cœur ; que cependant il pouvoit compter que, s’il vouloit établir son séjour en Portugal, il le feroit servir en roy, luy donnant tous les officiers qui sont ordinairement employez auprés de la personne d’un souverain. Pierre le remercia de ses honnêtetez, et dissimula le chagrin qu’il avoit dans le cœur de se voir éconduit.

Il s’avisa d’une autre ressource : il se souvint que le prince de Galles avoit été souvent aux mains avec les François, et qu’il n’étoit pas leur amy. Cette pensée fut fort soutenue par le roy de Portugal, auquel il s’ouvrit là dessus, et qui luy conseilla de prendre ce party, luy disant qu’il n’étoit pas nécessaire qu’il fit le trajet pour passer en Angleterre, puis qu’il trouveroit dans la Guinne le prince de Galles, qui, selon toutes les apparences, épouseroit ses interêts avec chaleur, ayant avec soy de fort belles troupes, avec lesquelles il avoit remporté de grands avantages contre les François ; qu’il pouvoit compter par avance que son voyage aurait un succés infaillible, puis qu’il y avoit longtemps que les mains luy démangeoient contre cette nation, sur laquelle il ne cherchoit que quelque spécieux prétexte pour faire des conquêtes.

Ces raisons encouragèrent Pierre à prendre le chemin de Bordeaux pour y parler au prince de Galles qui y tenoit sa Cour. Il fit donc preparer un vaisseau sur lequel il chargea ce qu’il avoit de plus riche et de plus précieux, sans oublier sa table d’or, et puis il y monta, suivy de vingt cinq chevaliers, de cinquante écuyers espagnols et de grand nombre de