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SUR DU GUESCLIN.

ses pressentimens, tint conseil avec le Besque de Vilaines et le maréchal d’Andreghem sur ce qu’ils auroient à faire.

Ils furent tous d’avis de ne se point séparer les uns des autres, et de faire des Bretons et des François un petit corps qui n’auroit avec les Genois et les Espagnols aucune communication dans cette journée. Bertrand se mit à la tête de sept cens bons hommes seulement, et commença par faire sonner la trompette comme le signal du combat qu’on alloit donner. Les deux armées firent un mouvement de part et d’autre pour venir aux approches. Les Anglois s’avancerent au nombre de trois mille archers pour tirer sur les Espagnols qu’ils se promettoient bien de defaire.

Jamais armée ne parut plus belle que celle d’Henry ; car outre vingt mille chevaux espagnols, dont les escadrons étoient tout de fer, il avoit vingt mille arbalêtriers genois et trente mille fantassins espagnols : aussi ce prince tout fier de se voir à la tête de tant de belles troupes, voulut ouvrir le combat en chargeant le corps d’armée que commandoit le captal de Buc. Il entra dans les rangs de ce general le sabre à la main, dont il fit une si grande exécution, qu’il tua plus de dix personnes ausquelles il fit d’abord mordre la poussière, et s’enfonça toujours davantage dans les escadrons ennemis avec une intrépidité surprenante, et poussa son cheval avec tant de force, qu’il passa tout au travers d’un gros corps de troupes sans être tué, ny pris, ny blessé. Bextrand qui voyoit ce prince se commettre si temerairement, et s’exposer comme un avanturier, apprehenda qu’il ne demeurât engagé sans se pouvoir tirer d’affaire. Ce fut la raison pour