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SUR DU GUESCLIN.

et d’embrasser celle de Mahomet, et la seconde l’engageoit de prendre sa fille en mariage, et de la faire couronner reine d’Espagne, et qu’en exécutant ces deux conditions, on luy livreroit entre les mains la personne d’Henry qu’il pouroit ensuite faire pendre comme un larron. Pierre luy promit qu’il executeroit ponctuellement tout ce que son maître attendoit de luy sans se démentir là dessus, le priant que tout fût prêt, afin que marchans toute nuit, ils pussent surprendre ce bâtard devant Tolede à la pointe du jour.

Bertrand étoit aux écoutes, et n’étoit qu’à deux lieües de là dans une embuscade. Il dépêcha des couriers à Henry, pour luy dire qu’il luy conseilloit de laisser la Reine, sa femme, et l’archevêque, avec quelques troupes devant Tolede, et d’en décamper tout doucement et sans bruit avec ce qu’il avoit de gens des plus déterminez et des plus intrepides, pour venir, sans sonner trompette, couper Pierre dans son chemin, tandis qu’il l’attaqueroit par derrière de son côté. Ce prince goûta fort le conseil de Bertrand, et monta bientôt à cheval pour l’executer. Le mouvement qu’il fit ne fut pas si secret, qu’un espion n’en donnât bientôt la nouvelle à Pierre. Cela luy donna quelque chagrin ; mais comme il n’étoit plus temps de faire un arrière-pied, il voulut pousser jusqu’au bout le dessein qu’il avoit entrepris. Il se mit donc en devoir d’encourager ses gens au combat. Pierre étoit monté sur un tygre dont le roi de Belmarin luy avoit fait présent, et qu’il avoit eu du roy de Damiette. C’etoit un fort beau cheval de Syrie, si vite à la course qu’on ne pouvoit jamais atteindre le cavalier qui le montoit, et d’ailleurs si infatigable qu’il ne se ressen-