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SUR DU GUESCLIN.

rir de la gloire dans une action dont il souhaitoit d’avoir le commandement, ne balança point à l’en laisser le maître tout seul. Clisson, dans le pressentiment qu’il avoit qu’il triompheroit des Anglois, se mit à la tête de tout son monde avec une joye incroyable, et surprit les ennemis comme ils étoient sur le point de s’embarquer dans leurs vaisseaux, et profitant du desordre dans lequel ils étoient, et de l’alarme qu’il leur donna, les vint charger en criant : Guesclin et Clisson ! à mort traîtres recreans ! jamais en Angleterre ne rentrerez sans mortel encombrier. La reputation d’un si grand capitaine, dont ils redoutoient la valeur, et qu’ils appelloient Clisson le Boucher, parce qu’il coupoit bras et jambes dans les combats, leur donna tant de crainte et tant de frayeur, qu’ils se laisserent hacher en pieces, et ne firent qu’une legere defense. Olivier en fit un si grand carnage, que de onze cens qu’ils étoient, il n’en resta pas deux cens. Le general qui les commandoit, et qui s’appelloit Robert de Neuville, fut trop heureux de se rendre et de se constituer prisonnier dans les mains de Clisson, qui, le menant à Bertrand, ne luy put pas donner une preuve plus évidente de la victoire qu’il avoit remportée, qu’en luy presentant captif le chef des Anglois. Il luy témoigna même qu’il ne devoit pas posseder tout seul la gloire de cette journée, puis que le vicomte de Rohan, les seigneurs de Reths et de Rochefort, le sire de Beaumanoir et Geoffroy Cassinel, avoient merité par leurs belles actions de la partager avec luy.