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SUR DU GUESCLIN.

geoient de soldats. Le gouverneur, tout à fait dévoüé à Pierre et qui fut present au rapport de cette nouvelle, encouragea les bourgeois à ne point perdre patience, et les menaça de mettre plûtôt le feu dans la ville que de souffrir qu’on songeât seulement à capituler. La plûpart des habitans ne s’accommodoient pas de la perseverance de ce commandant, et craignoient fort d’être pris d’assaut et d’essuyer la cruauté du soldat vainqueur, à qui l’on donne la licence de faire tout impunément ; car Henry battoit toûjours la ville avec douze machines de guerre qu’il avoit fait faire.

Cependant le roy Pierre s’étant tiré de la servitude à force d’argent, s’étoit rendu dans Salamanque à grandes journées pour demander du secours au roy de Belmarin ou de Leon[1]. Quand ce dernier sçut sa venuë, il luy fit dire de luy venir parler. Pierre le trouva dans son palais, assis au milieu d’une foule de seigneurs qui luy faisoient fort respectueusement leur cour. Ce pauvre Roy luy fit une profonde reverence et luy fit de son mieux la peinture de ses malheurs. Il luy parla d’Henry comme d’un usurpateur qui l’avoit chassé de ses États par les armes d’un nommé Bertrand, chevalier breton, qui s’étoit mis à la tête de tous les vagabonds de France, avec lesquels

  1. L’auteur des Mémoires se trompe en parlant ici du roi de Léon. Pierre, pour se rendre dans le royaume de Léon, n’auroit pas eu besoin de s’embarquer, puisque ce royaume étoit en Espagne. L’auteur a été trompé sans doute par le nom de la ville de Sarmaranc qu’il a cru être Salamanque. La vérité est que Pierre aborda en Afrique dans le royaume de Bennemarine, et qu’il se transporta à Sarmaranc, où le roi africain tenoit sa cour.