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Le maréchal d’Ancre, qui doit être inséparable des intérêts de celle qui l’a élevé au plus haut point où étranger puisse aspirer raisonnablement, sera si aveuglé, qu’il agira contre les volontés de sa maîtresse pour suivre un parti qu’il estime capable de le maintenir. Les divers caprices de sa femme nuiront encore beaucoup à sa maîtresse. Tant qu’il y aura de l’argent dans l’épargne pour satisfaire à l’appétit déréglé d’un chacun, les divisions demeureront dans le cabinet et dans la cour, et le repos de la France ne sera pas ouvertement troublé ; mais, lorsque les coffres de l’épargne seront épuisés, la discorde s’étendra dans les provinces, et partagera la France, en sorte que, bien que l’autorité royale ne puisse être qu’en un lieu, son ombre paroîtra en diverses parties du royaume, où ceux qui prendront les armes protesteront ne les avoir en main que pour le service du Roi, contre qui ils agiront.

Jamais on ne vit plus de mutations sur un théâtre qu’on en verra en ces occasions : la paix et la guerre se feront plusieurs fois ; et, bien que la cour et la France soient toujours en trouble, on peut toutefois dire avec vérité que jamais minorité n’a été plus paisible ni plus heureuse.

Pour distinguer et mieux connoître les changemens désignés ci-dessus, il faut noter que l’administration que la Reine a eue de cet État pendant sa régence, et quelque temps après, a eu quatre faces différentes.

La première conserva pour un temps des marques de la majesté que la vertu du grand Henri avoit attachée à sa conduite, en tant que les mêmes ministres qui avoient sous son autorité supporté les charges de