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heure, ils s’y trouvent. Sauveterre a défense de laisser entrer qui que ce soit. Tandis qu’ils sont avec Sa Majesté, le marquis d’Ancre et sa femme, qui ne manquoient pas d’espions auprès de la Reine pour savoir tout ce qu’elle faisoit et ceux qui lui parloient, sont incontinent avertis que les ministres sont avec elle et lui parlent en secret. Le marquis monte aussitôt au cabinet de la Reine, frappe à la porte ; Sauveterre en avertit la Reine, et reçoit un nouvel ordre de ne laisser entrer ni lui ni autres.

Les ministres disent à la Reine les avis qu’ils ont reçus de la poursuite que le marquis d’Ancre fait auprès d’elle pour M. le prince, le blâment lui et sa femme, les accusent de beaucoup d’imprudences préjudiciables à son autorité et au service du Roi, et lui remontrent la conséquence que ce seroit de donner des places à un premier prince du sang dans son gouvernement, et une place importante comme est la ville de Bordeaux, située au milieu de ceux de la religion.

Ils n’eurent pas beaucoup de peine à persuader la Reine, à laquelle le feu Roi avoit dit plusieurs fois, parlant de ce qui s’étoit passé en sa jeunesse, que si, pendant qu’il étoit en guerre avec Henri iii, il eût eu le Château-Trompette, il se fût fait duc de Guienne.

Quand ils se furent retirés, le marquis voulant parler à la Reine, elle lui fit mauvais visage, tant que, peu de jours après, voyant qu’il continuoit de la presser de cette affaire, elle se mit en telle colère contre lui, qu’il n’osa plus lui en parler davantage.