Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’audace de l’attaquer en un lieu si saint, il pourroit avec le temps être emporté par force, et se laisser vaincre à la violence de leurs poursuites ;

Qu’elle jugeoit bien que, quand l’on est parvenu par beaucoup de peines et de périls au comble d’une grande réputation, la prudence veut qu’on pense à une favorable retraite, de peur qu’on ne perde par la révolution des choses humaines ce qu’on a si chèrement acquis ;

Qu’elle savoit que les offices les plus mal reconnus sont ceux qu’on rend au public, et qu’un mauvais événement pouvoit ternir la gloire de ses actions passées.

Mais, quelque instance qu’elle pût faire, le Roi ne lui voulut jamais accorder de quitter le gouvernement de ses affaires. En quoi elle ne fut pas trompée, car elle ne le désiroit, ni ne craignoit que le Roi la prît au mot ; mais les raisons qu’elle lui avoit apportées lui sembloient être si recherchées, qu’il crut qu’elles lui avoient été plutôt insinuées qu’elle ne les avoit conçues en son esprit, et pour ce ne s’ouvrit pas avec elle des mécontentemens qu’il commençoit à recevoir du prodigieux élèvement du maréchal d’Ancre, ne jugeant pas qu’elle eût volonté d’y remédier, mais l’assura qu’il étoit très-satisfait de son administration, que personne ne lui parloit d’elle qu’en des termes convenables à sa dignité.

Le sieur de Luynes ne lui en dit pas moins, et accompagna ses paroles de gestes et de sermens, et de toutes autres circonstances qui peuvent servir à cacher un cœur double, et qui a une intention toute contraire à ce qu’il promet. Il ne put néanmoins si