Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/362

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plus faux sont bien souvent plus vraisemblables que les véritables, et paticulièrement que ce qui se dit en faveur des séditieux est plus facilement cru que la vérité qui est rapportée en faveur du prince, vouloit patienter jusqu’à l’extrémité, pour ne leur donner aucun jour à publier, avec la moindre apparence du monde, qu’ils eussent été obligés, pour leur défense, à prendre les armes contre le Roi.

Si cela portoit d’un côté quelque préjudice à l’opinion qu’on devoit avoir de la puissance royale, qui en étoit moins estimée, de sorte que plusieurs parloient mal des affaires du Roi et en désespéroient, cela lui apportoit d’autre part un avantage bien plus considérable, qui étoit que les princes prenoient une telle assurance en leurs forces, qu’ils ne pensoient plus à sortir de la cour, et croyoient pouvoir exécuter tout ce qu’ils voudroient entreprendre contre Sa Majesté, ne sachant pas ni que sous main elle eût mis ordre à la sûreté de ses affaires, ni que ceux-là mêmes d’entre eux à qui ils se fioient le plus jouoient à la fausse compagnie, et l’avertissoient d’heure à autre de tout ce qu’ils faisoient.

La Reine, voyant cette grande cabale des princes, qui étonnoit tout le monde, voulut prendre cette occasion de reparler encore au Roi comme elle avoit fait auparavant, et dit à Barbin qu’elle voyoit les choses si désespérées, qu’elle croyoit qu’il seroit de son honneur d’en remettre entièrement la conduite entre les mains du Roi. Mais ledit Barbin lui fit toucher au doigt qu’elle ne devoit pas seulement penser à sortir volontairement des affaires, mais employer tout son soin à empêcher que le Roi en fût chassé avec force