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tune, et le peu de sûreté qu’il y a aux choses qui semblent être plus assurées en la condition humaine.

En m’en venant, comme j’étois sur le Pont-Neuf, je rencontrai Le Tremblay[1], qui, après m’avoir conté ce qu’il avoit appris au Louvre de l’accident qui étoit arrivé, me dit que le Roi me faisoit chercher, et qu’il s’étoit même chargé de me le faire savoir s’il me rencontroit. Comme je fus proche du Louvre, je sus que les sieurs Mangot et Barbin étoient chez le sieur de Bressieux, premier écuyer de la Reine : je montai où ils étoient, où je sus qu’ils avoient déjà appris ce que du Tremblay m’avoit dit, et qui plus est qu’on parloit de Barbin auprès du Roi avec une grande animosité, qui ne lui donnoit pas peu de crainte.

Nous mîmes en délibération s’ils viendroient au Louvre avec moi, et, tous ceux qui en venoient nous confirmant ce qui avoit été dit des uns et des autres, il fut résolu que nous n’irions au Louvre que les uns après les autres, et qu’eux demeurant encore là pour quelque temps, je m’en irois devant pour recevoir les commandemens du Roi. Continuant mon chemin, je rencontrai divers visages qui m’ayant fait caresses deux heures auparavant ne me reconnoissoient plus, plusieurs aussi qui ne me firent point connoître de changer pour le changement de la fortune.

D’abord que j’entrai dans la galerie du Louvre, le Roi étoit élevé sur un jeu de billard pour être mieux vu de tout le monde. Il m’appela, et me dit qu’il savoit bien que je n’avois pas été des mauvais conseils du maréchal d’Ancre, et que je l’avois toujours aimé (il usa de ces mots), et été pour lui aux occasions

  1. Du Tremblay, frère du célèbre père Joseph.