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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/520

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on la forceroit d’en avoir du ressentiment ; ou au contraire, si ce changement arrivoit après la réconciliation, quand bien elle auroit mauvaise volonté contre eux, elle ne leur oseroit malfaire, de peur de se perdre de réputation devant tout le monde.

Modène fit semblant de goûter ses raisons. À quelques jours de là il lui dit qu’il est résolu de partir, et lui demanda une lettre de recommandation à la Reine, laquelle il lui donna. La Reine le reçut avec toute sorte de bonne chère, et de visage et de présence, et lui en récompense lui débaucha autant qu’il put de ses serviteurs, et fit de la plupart d’eux autant de pensionnaires de Luynes et d’espions de la Reine, à laquelle, quoiqu’il déployât toutes les voiles de son bien dire, il ne put persuader de faire chose indigne de son courage, ni d’avouer avoir failli en ce qu’elle avoit bien servi le Roi, estimant trompeuse une réconciliation le commencement de laquelle tendoit à la rendre coupable contre la vérité.

Au retour de cet ambassadeur, quelque petit rayon d’espérance de liberté parut à M. le prince, lequel ils transférèrent, le 15 de septembre, de la Bastille au bois de Vincennes, dont il estimoit l’air meilleur et la demeure moins resserrée, et ressentant son élargissement de prison ; mais son désir le trompoit, car ils n’avoient nulle pensée qui tendît à sa liberté ; au contraire, ils estimoient n’avoir assurance qu’en la détention de la Reine et de lui, et croyoient qu’en les tenant tous deux en leur puissance, ils ne pourroient recevoir aucune secousse en l’assiette de leur fortune.

Modène dit un jour à Barbin, en la Bastille, que