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que s’il avoit osé conspirer contre lui, dont il connoissoit le courage et la puissance, il le feroit bien plus volontiers contre ses enfans.

Il ajouta qu’il savoit bien qu’en pardonnant au maréchal plusieurs loueroient hautement sa clémence, et qu’on répandroit faussement par le peuple que l’appréhension de ce personnage faisoit plus contre lui que ses crimes ; mais qu’il falloit se moquer des faux bruits en matière d’État, que la clémence en certaines occasions étoit cruauté, et qu’outre que ce seroit chose répugnante à son courage que de faire mal sans l’avoir mérité, s’il le faisoit il appréhendoit les châtimens de Dieu, qui ne bénit jamais les princes qui usent de telle violence.

En cela la Reine, qui déféroit beaucoup en toutes occasions à son autorité, déféra en celle-là tout à sa raison, qui, ne pouvant être contredite par personne, le devoit être moins par une princesse de sa naissance et de sa maison, qui ne laisse jamais impuni aucun crime qui concerne l’État.

Une autre fois le duc de Sully lui ayant fait connoître que la puissance et l’humeur du duc de Bouillon devoient être suspectes à la sûreté de ses enfans, si le Roi venoit à lui manquer, elle en parla au Roi lorsqu’il fut tombé dans sa disgrâce, et que Sa Majesté entreprit expressément le voyage de Sedan pour châtier sa rebellion. Le Roi lui répondit, avec sa promptitude ordinaire, qu’il étoit vrai que le parti et l’humeur de cet homme étoient ennemis du repos de la France, qu’il s’en alloit d’autant plus volontiers pour le châtier, qu’il étoit si malavisé que de croire qu’il n’oseroit l’entreprendre, et qu’il le mettroit as-